Dans les 150 poèmes qu’il a mis en
musique Paco Ibañez a bien sûr chanté la beauté, l’amour, le mystère
d’être, la mort mais il a toujours associé poésie et combat. Combat pour
la liberté, pour la vérité qu’il faut crier même si elle «est amère»
comme l’a écrit Quevedo. Combat contre l’oppression, l’injustice et
toutes les atteintes à la dignité humaine.
Au XIVème siècle l’archiprêtre de Hita
dénonçait déjà le pouvoir pervers de l’argent, au XXème le grand-père de
Goytisolo conseillait à son petit garçon de ne pas hésiter à piétiner
les autres pour «réussir» dans la vie, et au début du XXIème ce monde de
l’argent-roi est devenu fou et a explosé. Avant que les responsables
politico-économiques de ce désastre qui a plongé dans la misère et le
désarroi des millions de personnes ne reconstruisent le système,
peut-être faudrait-il avec Paco et Alberti «galopar» tous ensemble
«jusqu’à les enfouir dans la mer»…
Formidable troubadour de la chanson
rebelle, il a le secret des liens qui unissent la musique et les mots,
et son répertoire toujours renouvelé garde la force et l’enchantement
qui ont fait de lui ce qu’il est, le grand Paco Ibañez !
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C’est très naturellement que Paco Ibañez s’inscrit
dans la mémoire de l’exil républicain espagnol que Memoria Andando
essaie de sauvegarder dans le Bassin.
Comme des centaines
de milliers d’Espagnols, la famille Ibañez passe la frontière en 1939.
A Paris le père, militant anarchiste valencien, est arrêté et envoyé au
camp d’Argelès.
La mère, basque, et ses quatre enfants retournent provisoirement en
Espagne, à San Sebastian. Ils repasseront clandestinement la frontière
en 1948 pour rejoindre le père à Perpignan. Dans les années 50 la
famille s’installe définitivement à Paris. Et c’est là que Paco va
découvrir Brassens, Atahualpa Yupanqui, Léo Ferré et tout le mouvement
existentialiste. Tout en accompagnant la chanteuse Carmela pendant huit
ans à travers toute l’Europe, Paco met en musique un premier poème de
Góngora («La mas bella niña ») et plusieurs poèmes de Federico Garcia
Lorca. Ce sera la source de son premier disque paru en 1964 et illustré
par Salvador Dali. Ainsi commence la relation profonde de Paco avec le
monde de la poésie de langue espagnole et des arts plastiques. Et
depuis, dans un engagement qui n’a jamais faibli, il n’a cessé de
chanter sur les plus grandes scènes du monde les vérités universelles
qui surgissent de la magnifique anthologie poétique qu’il a su si
brillamment mettre en musique.
-Textes de Jean-
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